two bros chilling in a cave five feet apart AVEC shizue poto

Un feu, c'est une sacré bonne idée, pour se réchauffer et essayer de se débarrasser de l'humidité qui traverse les couches de vêtements comme si de rien n'était. c'est même ce que Daim s'apprête à faire : un feu. et visiblement il n'est pas le seul à avoir cette idée de génie car au moment où il pose au sol les branches sélectionnées avec soin, une lueur brille dans la caverne et éclaire le visage de quelqu'un, précédée par une question qui rebondit contre les parois trop proches.

ah.

bon, il n'est pas seul, c'est effectivement ce qu'il avait espéré plus tôt, tout du moins il s'était attristé sur sa solitude, mais avait-il vraiment envie de voir quelqu'un, là, tout de suite ?

ouais, y'a moi.

est-ce qu'il a vraiment envie d'avoir à s'installer, sourire plus ou moins, participer à la conversation ? devoir s'intéresser à l'autre, faire semblant d'écouter attentivement une histoire peut être carrément chiante ? et si on lui pose des questions, qu'est-ce qu'il pourra bien dire ? "alors moi, pour la petite histoire, je viens tout droit des Terres Grises... ah, pourquoi je suis là ? non, je n'ai pas de pouvoirs, j'ai juste du quitter mon clan car j'ai étranglé mon père. et vous, ça va, la famille ?"
terrible.

mais au fur et à mesure, ses yeux sombres s'habituent à l'obscurité et perçoivent mieux cet occupant inattendu, qui avait sûrement le même problème que lui avec la pluie. ils ont donc déjà un peu commun, mais surtout...

ah, c'est toi !

le ton est soudain beaucoup plus enjoué et le léger sourire qui s'étale sur son visage tout à fait sincère. il le connait, ce gars tout sombre et aussi trempé que lui qui se tient au fond de la petite caverne, il l'a souvent vu ! enfin, il a souvent cherché à le voir. ils avaient mis les pieds sur l'île le même jour, il avait aperçu la longue chevelure brune alors qu'il s'enfonçait dans les bois pour n'y émerger que plusieurs semaines après. il l'avait recroisé une autre fois, par accident - pour de vrai ! - de loin et l'avait reconnu. depuis, Daim avait compris que l'autre faisait partie du fameux gang qui emmerdait plus ou moins tout le monde sur l'Archipel, mais il n'avait pu s'empêcher d'essayer de s'approcher pour discuter. de quoi ? allez savoir,
il avait envie de parler avec la seule personne qu'il avait aperçu le jour où il s'était senti plus bas que terre,
c'est tout.

je m'abrite seulement de la pluie, ça drache trop depuis des jours... tu me laisseras bien une place, dis.

la dernière phrase avait été prononcée comme une affirmation et non comme une question. pas même une demande, non : il se sentait en son bon droit en posant son sac contre l'une des parois de la caverne et en s'approchant de l'inconnu pas si étranger que ça en faisant mine de ne pas remarquer les claquements humides qu'il fait à chaque pas. flap, flap. il installe, quelques pas en face de lui, les branches qu'il avait amené, les agençant soigneusement pour s'assurer que le feu brûlera longtemps, assez pour espérer être sec. il travaille vite et sans un mot, absorbé par la tâche, mais une fois qu'il en est satisfait il s'intéresse à nouveau à son colocataire de fortune.

bon, j'sais pas comment t'as fait une flamme tout à l'heure, mais mon briquet est définitivement tripé, donc... j'te laisse t'en charger, hein ?

encore une fois, malgré la question, l'intonation laisse peu de place à la discussion et affirme simplement. il est pourtant poli à sa manière, Daim, mais cela lui semble tellement évident qu'ils ont besoin de se sécher et de se réchauffer qu'il n'imagine pas une seule seconde que l'autre puisse refuser qu'on lui donne des ordres. chez lui, chacun sait ce qu'il sait faire et le fait sans poser de questions. et puis quoi, simplement car tu en as marre de tanner les peaux alors que tu es le plus doué, on te laissera ne pas le faire ? non, ça ne marche pas comme ça. alors si tu as de quoi allumer un feu mieux que moi, tu le feras, c'est tout. chacun fait sa part selon ce qu'il sait faire, et les cochons seront bien gardés.

mais ça veut dire que tant que le feu n'est pas allumé, il n'a rien à faire, le chasseur toujours trempé de la tête aux pieds. pour éviter de mourir d'hypothermie ou d'être foudroyé par une pneumonie soudaine dans quelques jours, il sait qu'il faut se débarrasser des vêtements mouillés, qui ne font qu'aggraver le problème et empêchent la température corporelle de remonter. bon, ça, c'est la théorie, c'est ce qu'il se raconte dans sa tête pendant qu'il fait la mise en pratique. la pratique, ça consiste à enlever son t-shirt et à s'approcher de l'entrée de la grotte pour l'essorer. il tord et retord le tissu dans un sens, puis dans l'autre, et marmonne un juron en constatant qu'autant d'eau se déverse que s'il venait de sauter dans un lac tout habillé.

mais maintenant que c'est fait, il se sent mieux ! au moins, il sera vite débarrassé de cette chienne d'humidité. il ne manque plus qu'un bon feu de bois, si son collègue d'infortune pouvait bien s'exécuter gentiment dans les plus brefs délais...