il se réveille avec une drôle de sensation, une sorte d'angoisse inexpliquée qui lui serre la poitrine. un cauchemar qui n'a pas tout à fait disparu, sans doute. rien de grave - ce n'était pas ça qui va gâcher sa journée.
le voilà dehors, donc, déterminé à profiter à fond du soleil qui règne sur l'île d'orpiment en cette fin de matinée. sac à dos sur l'épaule, sourire aux lèvres, aaron s'avance vaillamment sur le sentier des ruines (qu'il commence à connaître par coeur, à force). la nature est sauvage, mais magnifique, et il se détend enfin. seulement, il n'est pas au bout de ses surprises. alors qu'il s'arrête pour admirer des champignons qui poussent le long du chemin, un pokémon agressif lui tombe dessus.
c'est pas grave, pense aaron. on va s'en sortir, moi et ma petite équipe.
sauf qu'ils ne s'en sortent pas, ou plutôt, de justesse. le garçon s'enfuit, serrant dans ses bras son kaiminus mal en point, des égratignures sur les genoux (quelle idée d'avoir mis un short, hein) et sa bonne humeur réduite en miettes. heureusement, la pension n'est pas si loin, ça devrait aller. haut les cœurs ! tout n'est pas encore perdu.
il court, se hâte, il ne regarde pas où il va, et bam ! il se cogne à quelqu'un. une fille immense. elle a un sourire mauvais en baissant les yeux vers lui. il sait déjà en la voyant que ça va mal finir. il balance des excuses hâtives et essaie de la coutourner, mais elle l'arrête d'une main sur son épaule.
« pas si vite, gamin. ton kaiminus est dans un sale état. tu ne sais pas t'en occuper ? »
il a envie de rétorquer, mais il sait que ce ne serait pas très malin, et puis de toute façon rien d'intelligent ne lui vient. ça n'a jamais été son fort, les répliques.
« non. la team spectre a besoin de plus de pokémons. donne-moi les tiens. »
il soupire un peu. bon. au moins il aura essayé. maintenant, c'est le moment de repartir en courant, dans l'autre sens, cette fois, et très vite, sans se retourner, pour ne pas se laisser attraper. aaron s'enfonce dans la végétation bordant le sentier, histoire de mettre toutes les chances de son côté. il est plus petit et agile que sa poursuivante ; mais c'était sans compter sur le nervosité qui le rend maladroit. il suffit d'une branche mal placée, de racines dans lesquelles il se prend les pieds, d'un creux dans lequel il trébuche—
crac cric crac badaboum, l'adolescent se casse la figure et glisse le long d'une pente couverte de cailloux.
le pokémon pousse un faible cri. aaron esquisse un demi-sourire, soulagé ; il n'est pas encore complètement dans les vappes. mais avant même qu'il se soit relevé, la sbire de la team spectre le rattrape. elle se tient en haut de la montée qu'il vient de dégringoler et le toise d'un air narquois.
« je t'ai retrouvé, » lance-t-elle en commençant à descendre la pente avec précaution.
ok, pas le temps de se réjouir, il faut repartir. il tente de se redresser, et cela lui tire un petit cri de douleur. impossible de poser sa cheville droite sur le sol. ça fait trop mal. le désespoir commence doucement à l'envahir, lorsqu'il entend des pas précipités se rapprocher. oh mon dieu, est-ce que quelqu'un vient dans cette direction ? est-ce qu'il est sauvé ? pourvu que ce ne soit pas un compagnon de l'autre géante. le cœur battant, newton calé contre lui, il fixe la direction d'où provient le bruit en retenant son souffle.